Commune
Auray
Département
Morbihan
Nombre d'habitant·es
14 200
Année(s)
Depuis 2020
Contexte
À Auray, l’équipe municipale issue de la liste citoyenne et participative « Auray ville citoyenne » avait clairement affiché lors de la campagne de 2020 le projet de déployer un plan d’alimentation durable sur la commune. Une fois élue, elle a acheté une ferme maraîchère en 2022, municipalisé des terres agricoles et est en train de construire sa propre cuisine centrale communale. Cela lui permet de produire les 700 repas distribués dans les 4 cantines scolaires des écoles publiques, les goûters servis à l’ensemble des enfants fréquentant les services périscolaires, ainsi que l’ensemble des prestations événementielles de la commune, en agriculture biologique et locale. Le bâtiment devrait être livré début 2026.
Le projet a été conforté par la revendication d’un collectif de parent·es d’élèves qui s’est mobilisé dès 2019 sur la qualité des repas dans les écoles d’Auray assurés jusqu’alors en liaison froide par la cuisine centrale de Lorient, située à 42 km. En intégrant petit à petit à la réflexion le collectif de parent·es soucieux·ses d’améliorer la qualité des repas dans les cantines, c’est toute la chaîne de production qui a été repensée du champ à l’assiette. Ne pouvant couvrir l’intégralité des besoins via sa ferme (laquelle produira la majeure partie des approvisionnements en légumes et une partie des fruits), la commune souhaite notamment faire appel à des paysan·nes locaux·les installé·es en agriculture biologique (élevage, produits laitiers, céréales, etc.) pour approvisionner sa cuisine, gagner ainsi en souveraineté alimentaire sur le territoire et participer au maintien de terres agricoles en agriculture biologique. Le projet global (construction de la cuisine, aménagement des offices des écoles, achat de la ferme) s’élève à 3 millions d’euros soit 14% du budget d’investissement du mandat.
Pour lancer ce projet politique collectif ambitieux, deux chantiers participatifs de défrichage des parcelles de la ferme ont été organisés. Environ 150 personnes volontaires, Alréen·nes ou habitant·es des communes voisines, ont participé au total aux deux événements.
Les habitant·es ont ensuite été appelé·es à rejoindre le groupe de travail « Alimentation durable » dès mi-janvier 2023 pour travailler sur l’ingénierie pédagogique du projet, le déroulé, les questions de solidarité, la tarification des repas, etc. Des élu·es, des parent·es d’élèves, des enseignant·es ont également fait partie du groupe de travail. Les agent·es de la cantine, plutôt inquiet·ètes initialement à l’idée de changer leurs habitudes de travail, ont également été consulté·es. Le passage en liaison chaude et en bacs gastronomiques inox aura en effet un impact sur leur quotidien. Grâce à ce travail conjoint, ces dernier·ères ont finalement été enthousiasmé·es par le projet, particulièrement par le fait de pouvoir participer dans leurs offices à ce changement de pratiques alimentaires, et surtout par la plus-value pédagogique pour les enfants de consommer des produits de la ferme municipale. Les agent·es ont pu visiter la ferme et notamment la parcelle pédagogique qui y est délimitée, sur laquelle les enfants du centre de loisirs et des écoles mais aussi les familles, pourront venir réaliser des ateliers et des plantations.
Réalisations
Après plusieurs mois de réflexion et de confrontation aux obstacles à l’installation d’un chantier d’insertion, l’équipe municipale a fait le choix de s’orienter vers une régie agricole municipale pour démarrer l’activité de la ferme.
En 2023, afin de ne pas laisser les terres à nu, les agent·es des services espaces verts et des services techniques, encadré·es par la chargée de mission sur le projet alimentaire ont semé et récolté plus de 600 kg de lentilles.
En 2024, des courgettes ont à leur tour été récoltées. Ce fut l’occasion d’associer la jeunesse alréenne à ce projet grâce à des missions d’arrosage dans le cadre d’un dispositif « Argent de poche ».
En septembre 2024, un agriculteur a été recruté en contrat à durée déterminée (CDD). Ses premières missions sont de planifier les travaux d’aménagement et de lancer les premières cultures qui serviront à fournir les cuisines déjà existantes de la crèche et du foyer-logement municipaux.
En novembre 2024, Auray a également recruté le responsable de la future cuisine communale, qui sera chargé d’accompagner la conception intérieure des locaux de production alimentaire, de préparer l’ouverture administrative de la structure, et surtout de travailler avec le maraîcher pour organiser les plans de culture en vue des besoins de la cuisine.
Le lien avec le territoire intercommunal s’est quant à lui établi autour du projet d’épicerie sociale et solidaire, troisième volet du projet alimentaire porté par la mairie d’Auray, en complément de la ferme et de la cuisine communales. Cette épicerie est en cours de développement pour, à l’échelle communale et intercommunale, promouvoir l’aide alimentaire et constituer un lieu d’animation autour des questions d’alimentation. Après étude de préfiguration, l’épicerie définira avec les acteur·rices de l’aide alimentaire, de l’action sociale et de la communauté de communes les besoins auxquels elle devra répondre prioritairement.
Apprentissages
L’élaboration de cette cantine communale, du champ à l’assiette, permet de travailler concrètement tout un panel de questions liées à la démocratie : comment gouverner localement en transversalité et de manière plus horizontale : avec les habitants, les associations, entre délégations et adjointures (scolaire, agriculture) et éventuellement à l’avenir, petit à petit, embarquer les communes mitoyennes dans l’aventure… Les élus, les agents et les habitants cultivent leur jardin pour changer les cultures politiques !
« Notre objectif est d’être le plus autonome possible en légumes, mais on sait qu’on ne pourra pas tout produire nous-même (on n’aura pas d’animaux, pas de céréales par exemple). Pour y arriver on travaillera en complémentarité avec les paysans du coin. Ça les a d’ailleurs beaucoup rassurés car ils avaient des craintes d’une éventuelle mise en concurrence sur le marché bio et local. Maintenant que le scénario de la cuisine centrale a été validé, que la ferme a été achetée, on va pouvoir intégrer les habitants usagers dans ce projet alimentation durable. Ce n’est pas qu’un projet de cantine bio et locale, cela permet du même coup de créer des débats et des actions autour des thématiques de l’alimentation, de l’environnement et de la solidarité ! »
Myriam Devingt, adjointe à l’éducation, l’enfance et la jeunesse à la Mairie d’Auray.