Lundis en Commun #6 : Second tour et premiers pas à la mairie

16 juin 2020

Lundi 8 juin 2020, 70 personnes se sont retrouvées dans le cadre des “Lundis en Commun” organisés par Action Commune autour de trois ateliers :

Atelier 1 : Comment continuer de porter le fonctionnement participatif au sein d’une alliance au second tour ? Atelier 2 : Comment faire campagne malgré les restrictions imposées par le gouvernement : des idées ? Atelier 3 : Conseil municipal — Écrire ensemble un exemple de règlement intérieur — Travail en groupe 1/2

Voici le résumé des 3 ateliers :

ATELIER 1 : Comment continuer de porter le fonctionnement participatif au sein d’une alliance au second tour ? animé par Ondine Baudon et Thomas Simon de Fréquence Commune.

L’atelier a réuni une quinzaine de personnes-membres de listes présentes au second tour. Parmi eux :
Bruno de Saint-Médard-en-Jalles, Lisa de Toulouse, Benjamin d’Annecy, Mélanie de La Chapelle-en-Vercors, Sabine de Cadenet dans le Lubéron, Sophie de Bayonne, Françoise de Chambéry, Hélène de Castanet.
Une fois de plus, des personnes venues des quarte coins de la France, toutes engagées pour transformer la démocratie locale, se sont retrouvées pour s’inspirer et construire, pas à pas, un réseau des communes et de collectifs participatifs.

Après un temps de présentation où chacun.e a pu raconter aux autres la situation de sa liste, les participant.e.s ont expliqué les concessions qu’ils ont dû faire pour faire alliance et avoir une chance de gagner la ville avec d’autres forces politiques.

Parmi les exemples inspirants, à Saint-Médard-en-Jalles, la liste participative a écrit et signé un “contrat de coopération” pour préciser dans le détail le fonctionnement du futur conseil municipal en cas de victoire. Parmi les mesures phares, un accord sur l’utilisation d’une méthode de décision issue de la sociocratie (la gestion par consentement), sera systématiquement utilisée pour toutes les décisions prises en conseil municipal. Une décision ambitieuse étant donné l’exigence de méthodologie que demande cette manière de décider. En tout cas, il s’agit là bien d’une expérimentation de transformation radicale de la gouvernance municipale qui n’a certainement jamais été testée auparavant dans une ville de 31 000 habitants. À suivre de près en cas de victoire !

À Annecy, Benjamin a raconté la difficulté de gérer la manière d’être, la posture de l’ancienne tête de liste avec laquelle ils ont fait alliance. En effet, certaines personnes ont du mal à passer d’un rôle de leader-décideur à un rôle de leader-collaboratif. Habituées à être tête de liste “à l’ancienne”, c’est-à-dire à vouloir tout gérer et prendre la plupart des décisions importantes seules ou en petit groupe très restreint, ces personnes se retrouvent aujourd’hui au sein d’une alliance (second sur la liste pour le cas d’Annecy), avec un collectif ayant maturé un fonctionnement participatif et où les figures, les têtes de listes, sont soumises aux mêmes exigences de co-décision que les autres membres du collectif. Cette transformation de fonctionnement en groupe, cette recherche d’un équilibre entre horizontalité et verticalité dans les prises de décisions bouleverse tous nos apprentissages. Nous sommes habitués à suivre un chef et à nous organiser avec une domination hiérarchique. C’est un processus de transformation collective et individuelle qui prend du temps pour toutes les listes participatives !

Après ces temps de partage d’expérience, nous sommes passés à un temps de partage d’idées en répondant à la question suivante : “En cas de victoire, qu’est-ce qu’il faudrait faire vivre aux élu.e.s des autres listes pour qu’ils aient vraiment envie de faire du participatif ?”

De nombreux collectifs et de nombreuses personnes rapportent que ça n’est pas en passant par l’explication de concepts théoriques sur la participation citoyenne que l’on va parvenir à convaincre des personnes non convaincues de l’importance, de l’efficacité et de la vertu des méthodes de gouvernance partagée et d’intelligence collective. Rien de remplace l’expérience vécue de ce genre de méthode.
Quand une liste participative gagne en s’étant alliée avec une autre liste qui jusqu’à présent ne fonctionnait pas sur ces méthodes de décision collective, il est essentiel de faire vivre aux élu.e.s ET aux agents non initiés ces nouvelles méthodes de décision. Cette expérience au sein du groupe sera décisive pour permettre la transformation de la démocratie locale dans la commune.

=> Voici quelques idées concrètes pour y parvenir :

  • Organiser rapidement un séminaire pour définir les rôles, l’organisation et les méthodes de décision du groupe d’élu.e.s ;
  • Faire vivre des temps d’inclusion, de déclusion et l’utilisation du jugement majoritaire ;
  • S’organiser en binôme pour chaque poste (une personne issue de la liste participative + une personne issue de l’autre liste) avec l’objectif de, pas à pas, sensibiliser à l’utilisation de ces nouvelles méthodes de décision ;
  • Avoir le lead sur des projets pour pouvoir les mener en gouvernance partagée et montrer par l’exemple, la force de ces méthodes ;
  • Organiser des réunions de groupe des élu.e.s animées par un animateur professionnel externe ;
  • Organiser des formations pour créer une culture commune participative ;
  • Garder l’association/le collectif de la liste pour qu’il soit source d’inspiration, source de vigilance (alerter sur les dérives, etc.) ;
  • Ré-agencer la salle du conseil municipal pour mettre à égalité les élu.e.s d’opposition et respecter les protocoles de transparence avec eux (par exemple donner tous les documents de travail en amont) ;
  • Faire un service dédié aux questions de gouvernance pour aider les élu.e.s à la prise de décision.

Pour terminer, il est fondamental de rappeler que les expériences de transformation de la démocratie en France et à l’international nous montrent que ce travail sur la gouvernance, sur la manière de décider ensemble au sein de la municipalité, ce travail sur la construction de dispositifs de participation inédits et ouverts : tout cela est vain si une large partie des moyens, du temps et des efforts n’est pas consacrée à l’autre pilier de la démocratie locale : la mobilisation des habitants.

ATELIER 2 : Comment faire campagne malgré les restrictions imposées par le gouvernement : des idées ? animé par Isabelle Dalban, avec l’intervention de Raphaël de la liste de Saint-Michel l’Observatoire.

Objectif de l’atelier : partager et mutualiser toutes les idées des différents collectifs et les actions qui ont été mises en place dans cette période particulière de déconfinement et avec l’annonce de la tenue du second tour à la fin du mois de juin.

Intervention de Raphaël de la liste participative de Saint-Michel l’Observatoire (1300 habitants) :

Trois actions mises en place pendant le confinement :

  • Mettre en place un système de solidarité paysanne (système d’achat et approvisionnement entre agriculteurs et habitants). Pour cela, nous avons utilisé un outil en ligne appelé “Cagette” (https://www.cagette.net/ participatif et gratuit) qui donne de l’autonomie aux producteurs et aux consommateurs. Réel succès sur cette action qui correspond à notre manière de voir la politique : quand des problèmes se posent dans le réel, on essaie de les résoudre de manière citoyenne sans attendre que la Mairie fasse les choses pour agir. C’est de l’auto-organisation et cet outil nous a été très utile pour cela.
  • Lancer une gazette participative (succès au sein de notre liste qui s’est montré très motivée pour contribuer et alimenter). Grâce à cet outil de communication participatif, on a réussi à transmettre de l’information capitale, pratique, liée à la situation du COVID ; et aussi à transmettre des infos liées aux activités du village. Cela a permis de créer du lien, de maintenir informés les habitants, de leur donner un espace d’expression. Cette gazette était un vecteur de lien social comme de démocratie locale. C’était aussi une manière de contrebalancer la communication municipale qui était à la fois hasardeuse et très complaisante avec l’équipe sortante.
  • Animer nos actions autour de la vie associative, particulièrement sur la thématique de l’école et sur la sécurité du village en période Covid, pour montrer qu’on est prêts. Nous allons aussi créer un sondage en ligne pour récupérer de l’info, des besoins des habitants. Aussi, on va se servir de ce sondage pour faire du porte-à-porte. L’idée : atteindre les gens et avoir un outil pour les démarcher autour d’une politique communale.

L’atelier s’est ensuite divisé en trois groupes pour que les participants puissent partager d’autres idées.

Les voici :
Plusieurs types d’outils ont été mis en place pour continuer à occuper le terrain, conserver de la visibilité et mettre en place des systèmes de solidarité entre habitants. Des outils présentiels et des outils en ligne.

Dans les outils présentiels il y a eu un gros focus sur les campagnes de procuration. Il y a un vrai enjeu pour récupérer les votes soit des indécis soit des personnes qui auraient peur de se déplacer pour voter au second tour dans les conditions sanitaires que l’on connaît. Il peut être utile de savoir qu’il est possible de récupérer les listes d’émargement du premier tour auprès du maire ou de la préfecture et d’en demander un extrait pour savoir qui a voté et faire une campagne plus ciblée.

  • Le vélo occupe une très grande place dans ce déconfinement et dans ce début de “monde d’après”. De nombreuses déambulations ont eu lieu, des “vélorution” ont été proposé. Vélos à carriole, porte-voix et mégaphones ont permis d’aller à la rencontre des habitants.
  • Enjeux d’occupation de l’espace public sur des lieux attractifs comme les marchés, les bars et terrasses des cafés qui ont réouverts (“barathons”, tournées de bars etc).
  • Beaucoup ont mis à profit le temps du confinement pour faire de la création artisanale : écharpes tricotées en laine pour être visibles dans l’espace public, , origamis en graines distribués dans les boîtes aux lettres pour délivrer des messages ou des petits slogans.
  • Outils à distance et online qui permettaient de s’adresser à des publics plutôt chez eux ou qui sortent moins : videos et live sur Facebook, temps collectifs enregistrées et diffusés en direct sur Facebook).
  • Campagnes de phoning (avis divisé car certains pensent que c’est dérangeant et d’autres pensent que dans ces conditions c’était un des seuls instruments qui étaient à disposition des collectifs pour faire campagne de manière ciblée et plus massifiée).
  • Débats télévisés sur les chaines régionales qui suscitent de l’intérêt.
  • Blogs, vidéos, réunions publiques sur zoom, radios sur internet qui rediffusaient des messages enregistrés sur une messagerie vocale des habitants pour partager des besoins, des préoccupations, des envies, des ressentis liés à cette période.

Mais aussi des inconnues sur certaines manières habituelles de faire campagne :

  • Le porte à porte dans le respect des règles sanitaires : comment parler à des gens qui ont peur ou qui se sentent mal à l’aise face au danger que représente le Covid-19 ?
  • Les frais de communication : sponsoring des communications sur les réseaux sociaux : est-ce pris en compte dans les comptes de campagne avec la modification de calendrier ? Certains aspects juridiques ne sont pas clairs et peuvent créer de la confusion.

ATELIER 3 : Conseil municipal — Écrire ensemble un exemple de règlement intérieur, animé par Elisabeth Dau du Mouvement Utopia et Commonspolis et Co-présidente d’Action commune.

L’objectif de cet atelier était d’établir avec les participant.e.s l’organisation d’un travail d’écriture collective d’un règlement intérieur intégrant une forte préoccupation pour plus d’implication habitante et de démocratie dans le fonctionnement municipal.

Cet atelier est reparti des échanges de l’atelier dédié au règlement intérieur du Lundis en Commun du 14 avril 2020.
=>Voir le résumé ici
=> Voir les notes ici

La proposition est de mettre en synergie des groupes de travail durant les 4 prochaines semaines pour proposer le 6 juillet prochain (date du prochain Lundi en Commun) un règlement intérieur bonifié à partir du modèle de base proposé par l’association des maires de France (AMF):

=> Voir lien suivant

Plusieurs thématiques sont ressorties des discussions du 14 avril et des attentes exprimées par les participant.e.s lors de ce dernier Lundi en Commun, à savoir :

  • La rémunération des élus : peut on bouger ça ?
  • Les droits de l’opposition : la communication ; la proposition (cf Dominique Filatre le 14 avril) de s’inspirer du rôle de questeur pour reconnaître à un élu de l’opposition, le droit d’obtenir les réponses sur toutes questions concernant le fonctionnement intérieur de la municipalité.
  • Questions orales et écrites : voir les différentes déclinaisons dans le document de l’AMF.
  • Proposition (D. Filatre) d’une responsabilité de « rendre des comptes » auprès des habitants (reddition des comptes) avec la création d’un jury citoyen au lieu du bilan de fin de mandat.
  • Mise à l’agenda de questions au CM par les habitants eux mêmes (cf Jo Spiegel avec la maison de la citoyenneté de Kingersheim).
  • Apporter une attention à la qualité du fonctionnement municipal dans la prise de décision mais aussi la qualité des relations entre les élu.e.s, dialogue, des séances des CM). Fait écho à Saillans avec le conseil des sages transformé en observatoire de la participation.
  • Nombreuses questions sur les commissions et délégations : quelle qualité de fonctionnement on peut décrire ?
  • La communication : pas évoqué lors du 1er atelier. Point à noter.
  • Comment faire entrer les ambitions de schéma de gouvernance démocratique dans le RI ?
  • Comment peser dans l’élaboration du RI en tant qu’élu minoritaire/d’opposition?: l’opposition peut déposer des amendements et peut poser des jalons dès le début du mandat pour dire qu’elle sera présente
  • Au moment de voter le RI il y a 5 jours entre la présentation et le vote. Ça va donc très vite.
  • Comment faire du travail sur le RI un exercice de transparence et de participation avec les habitants ? (Ex: profiter du contexte COVID pour inciter les habitants à suivre les CM en live et les questions sur le RI)
  • Comment intégrer la dimension des assemblée citoyennes et des observatoires citoyens dans le RI ? Dedans ou à part ? Dans le chapitre des commissions ?
  • RI très cadré, quelles latitudes dans la rédaction d’un RI ?
  • Comment ne pas se mettre en mal avec la légalité, mais créer des espaces d’ouverture sans écrire noir sur blanc (Ex: le fonctionnement en binôme du maire ne peut pas être mis au RI)
  • Le RI est une première occasion de pédagogie pour expliquer la complexité du fonctionnement municipal.
  • Quelle place (incontournable ou non) du DGS ? Peut-il s’opposer à une proposition de RI ?

5 axes de travail sont retenus pour avancer sur l’écriture collective des dispositions du règlement intérieur et le partage de ressources inspirantes (règlements intérieurs d’autres communes, articles, liens) :

  • Participation citoyenne/participation habitante/schéma de gouvernance-RI:
  • Communication
  • Droit de l’opposition
  • Mobilisation collective autour d’un règlement intérieur
  • Cadre juridique

Un espace de travail dédié et une mailing liste seront créés pour les participant.e.s des ateliers des 14 avril et du 8 juin dédiés au règlement intérieur. Une réunion hebdomadaire permettra de faire le point sur l’avancée des contributions.

Le résultat de ce travail collectif sera partagé et mis en discussion lors du Lundi en Commun du 6 juillet prochain.