Notre « vision » de la démocratie chez Fréquence Commune

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13 février 2023

Comment peut-on vraiment impliquer les citoyens dans la vie politique ? 

Les limites souvent évoquées sont : comment faire participer le plus grand nombre ? comment les citoyens et citoyennes peuvent décider sans expertise ?

Dans le fonctionnement politique actuel, pour pallier la problématique du trop grand nombre, on désigne des représentant·e·s qui ont pour fonction de décider à la place des autres via le mandat représentatif ; et pour prendre des décisions éclairées, on choisit  “les meilleurs” à travers l’élection.

Depuis 30 ans, la démocratie participative, qui apparaît souvent comme LA solution pour pallier ce système, n’a pas l’impact escompté. 

En premier lieu parce qu’elle se fait en parallèle et non en lien avec les instances de pouvoir. Dans la grande majorité des cas, les élu.e.s mettent en place des instances pour faire participer les habitant.e.s, en dehors des circuits de décision. Les élu.e.s et l’administration n’étant pas associés à ces processus, ils n’arrivent pas ou ne veulent pas, se saisir des propositions et arbitrages citoyens. Ce qui a pour conséquence directe de créer un sentiment de trahison de toutes celles et ceux qui y ont participé. Ce qui désenchante encore un peu plus la politique.

En second lieu, la démocratie participative, telle qu’elle est appliquée aujourd’hui, creuse les inégalités. En effet, ce sont toujours les mêmes qui viennent dans ces instances participatives, un peu comme ce sont toujours les mêmes qui votent.

Et enfin la démocratie participative est souvent utilisée comme un gadget numérique et parfois se réduit à des copier-coller de processus clés en mains. Dans le pire des cas, elle se limite aux nombres de clics ou de commentaires sur une proposition en ligne entre citoyens.

 

La démocratie délibérative

Chez Fréquence Commune, nous croyons que la base du fonctionnement démocratique c’est la délibération, c’est-à-dire permettre à des citoyen·ne·s de se rencontrer, de confronter leurs idées sur un sujet précis pour construire ensemble, petit à petit et avec méthode, une proposition politique collective. En chemin, ces citoyen·ne·s gagnent en compétence, assument leur conflictualité, échangent des arguments, examinent les controverses et font probablement évoluer leurs opinions pour finalement arriver à une décision d’intérêt général. L’expérience le montre, ainsi organisés les citoyens et citoyennes dépassent leurs postures idéologiques et leurs préjugés et réussissent à prendre des décisions concrètes et transformatrices pour leur commune, leur territoire, leurs vies.

 

L’importance de la mobilsation et du lien à la décision

Il est nécessaire pour cela, de travailler le lien à la décision, c’est-à-dire le lien entre l’équipe d’élu·e·s qui prendra la décision finale et les habitant·e·s qui participent à l’élaboration de cette décision. En bref, aller chercher la sincérité politique de la démarche. Cela évite de mauvaises surprises en fin de processus, à l’instar du Grand débat national ou de la Convention citoyenne pour le climat, dont les travaux n’ont pas été pris en compte comme annoncé.

Il est important également de ne pas opposer la représentation des élu·e·s et la décision du peuple. La clé du fonctionnement démocratique c’est “le travail associé” : réussir à allier directement les citoyen·ne·s, les élu·e·s et les agents dans les arbitrages et les actions à mettre en place. Un mode de travail qui permet de gagner du temps et de prendre des décisions beaucoup plus solides et pérennes.

La mobilisation est l’autre clé pour assurer la représentativité des citoyen·ne·s associés dans ces processus participatifs et permettre à n’importe qui, toutes classes sociales, générations, cultures confondues, de participer activement à la délibération et à la décision, et notamment celles et ceux qui ne seraient pas venues d’eux-mêmes. De nombreuses méthodes, adaptées à ces enjeux de diversité et de mobilisation, ont été à ce jour expérimentées, et sont sans cesse améliorées, particulièrement le tirage au sort et le porte-à-porte.

 

À l’échelle locale

Il est évident qu’il est impossible de délibérer à 67,8 millions de personnes sur tous les sujets. La démocratie implique un échange réel, physique, qui permet une connaissance et une compréhension de la réalité de l’autre pour construire et consentir à une décision commune.

Depuis quelques années une révolution silencieuse est à l’œuvre en France, une centaine de communes participatives sont en train de prouver qu’il est possible de gouverner autrement, de faire de la démocratie délibérative parce que l’échelon local est le levier le plus adéquat pour construire des décisions qui permettent des traductions concrètes, des réponses, des changements impactants. Chaque expérience démocratique que nous menons sur le terrain nous confirme que la commune est l’échelle pertinente pour organiser la vie démocratique de notre société. 

 

Voir plus large

Penser le local n’a de sens qu’avec une vision globale. Une grande partie des enjeux écologiques et sociaux peuvent trouver leur réponse au local, mais les échelons supérieurs sont indispensables à une transformation complète de nos sociétés vers un monde soutenable. Partout en Europe et dans le monde d’autres initiatives voient le jour pour transformer les pratiques politiques vers la démocratie en faveur de la justice sociale et de l’écologie.